La maladie de Refsum fait partie du groupe des leucodystrophies et se caractérise sur le plan biochimique par une accumulation d’acide phytanique. La prévalence de la maladie est de 1 cas pour
1 000 000 ; les deux sexes sont atteints.
1. Aspects cliniques
Introduction
Le Norvégien Sigwald Refsum identifie dans les années 40 une nouvelle maladie, qu’il appelle “heredopathia atactica polyneuritiformis”, et qui, selon lui, est caractérisée par quatre symptômes :
une rétinite pigmentaire;
une ataxie cérébelleuse;
une polyneuropathie chronique et
une augmentation de la concentration en protéines dans le liquide céphalorachidien sans pour autant une augmentation des cellules dans ce même liquide.
Un progrès majeur dans la compréhension de la physiopathologie de ce qui s’appelle désormais la maladie de Refsum, est la découverte par Klenk et Kahlke, au début des années 60, d’une accumulation d’acide phytanique (acide 3,7,11,15-tetramethylhexadécanoïque) dans le plasma sanguin et les tissus de patients atteints des symptômes décrits ci-dessus. La maladie de Refsum s’avère donc être un trouble du métabolisme des lipides. Le dosage d’acide phytanique permet dès lors de poser le diagnostic chez des patients ne présentant qu’une partie des symptômes décrits par Refsum, ce qui redéfinit la sémiologie de la maladie. La rétinite pigmentaire à début précoce et la perte de l’odorat se retrouvent chez pratiquement tous les patients alors que la polyneuropathie, la surdité, l’ataxie cérébelleuse, l’ichtyose et les troubles du rythme cardiaque sont moins fréquents. Les premiers signes de la maladie peuvent se manifester à n’importe quel âge : chez les jeunes enfants mais aussi chez des adultes âgés de plus de 50 ans.
Atteinte ophtalmologique
Le symptôme le plus précoce de la maladie de Refsum est généralement une diminution progressive de la vision de nuit (ou cécité nocturne). Dans un second temps (souvent après quelques années), la rétinite pigmentaire peut aboutir à un rétrécissement du champ visuel et à la cécité. Un électrorétinogramme (ERG) peut contribuer à confirmer le diagnostic ophtalmologique qui est par ailleurs difficile à poser, surtout chez les jeunes enfants.
Perte de l’odorat
La perte de l’odorat se retrouve chez pratiquement tous les patients atteints de la maladie de Refsum lorsqu’ils subissent des tests olfactifs.
Polyneuropathie
Les patients atteints d’une maladie de Refsum peuvent présenter une polyneuropathie sensitivo-motrice chronique qui est asymétrique et a un caractère progressif si elle n’est pas (suffisamment) traitée. Cette polyneuropathie n’est pas toujours évidente lorsque le diagnostic de maladie de Refsum est posé, en raison de son évolution par poussées et rémissions. Elle peut provoquer à long terme une atrophie musculaire et donc un déficit moteur non seulement des membres inférieurs mais aussi du tronc. La plupart des patients présentent également des troubles sensoriels.
Surdité
Il s’agit d’une surdité de perception, bilatérale et symétrique, qui porte sur les fréquences aiguës et les fréquences conversationnelles. Cette surdité peut être modérée ou sévère.
Le diagnostic peut être confirmé si nécessaire par des potentiels évoqués auditifs.
Ataxie cérébelleuse
L’ataxie cérébelleuse est généralement considérée comme un des symptômes cliniques majeurs de la maladie de Refsum, en dépit d’une manifestation clinique plus tardive que celles de la rétinite pigmentaire et de la polyneuropathie. Les patients atteints d’ataxie cérébelleuse souffrent notamment de difficultés à la marche.
Ichtyose
L’ichtyose se caractérise par une accumulation de squames donnant à la peau un aspect rêche. Elle n’affecte qu’une minorité des patients atteints de la maladie de Refsum, qui en présentent généralement les premiers signes pendant l’adolescence. Une manifestation pendant la petite enfance est moins commune.
Atteinte cardiaque
Les complications d’une cardiomyopathie, tels que les troubles du rythme ou une insuffisance cardiaque, sont souvent la cause du décès de patients atteints de la maladie de Refsum.
2. Aspects biochimiques et génétiques
Diagnostic
Une suspicion de maladie de Refsum peut être confirmée par un dosage d’acide phytanique dans le plasma sanguin, effectué dans un laboratoire certifié. Un dosage supérieur à 100 micromoles par litre évoque fortement une maladie de Refsum, un dosage normal étant inférieur à 10 micromoles par litre. Le diagnostic doit par la suite être confirmé par séquençage du gène codant pour la phytanoyl-CoA hydroxylase, qui doit mettre en évidence deux mutations : une par chromosome hérité des parents.
3. Aspects thérapeutiques
A l’heure actuelle, il n’y a pas de traitement curatif pour la maladie de Refsum. Le traitement est axé sur la réduction des taux plasmatiques d’acide phytanique afin de ralentir la progression de la maladie.
Il faut traiter les troubles du rythme cardiaque, l’ichtyose et les complications neurologiques telles qu’un déficit moteur dans le cadre d’une polyneuropathie et une ataxie prononcée. Ces symptômes réagissent en général très bien à une forte réduction des taux plasmatiques d’acide phytanique. La rétinite pigmentaire, la perte d’odorat et la surdité ne semblent par contre pas être réversibles.
Prise en charge à long terme
Régime pauvre en acide phytanique (contrairement aux idées reçues, il n’est pas nécessaire d’éviter les légumes verts; il faut par contre éviter les produits laitiers, la viande de ruminants et les poissons)
Apport calorique régulier et suffisant pour éviter tout catabolisme entrainant une lipolyse qui conduirait à la mobilisation d’acide phytanique stocké dans le tissu adipeux ou le foie.
Des précautions supplémentaires (telles qu’une alimentation parentérale) sont à prendre lors d’une intervention chirurgicale.
Un suivi par un cardiologue est recommandé afin d’éviter les complications d’une cardiomyopathie, telles que les troubles du rythme ou l’insuffisance cardiaque.
Un traitement symptomatique par crèmes hydratantes peut soulager l’ichtyose.
Pr. Ronald J. Wanders, Academic Medical Center, Amsterdam, Pays-Bas