En 1984, Jean Aicardi et Françoise Goutières, deux neuropédiatres français, ont décrit une maladie génétique du cerveau débutant dans l'enfance imitant les caractéristiques des infections virales dont souffrent les enfants dans l'utérus.

Les indicateurs cliniques de cette maladie, maintenant connue comme le syndrome d'Aicardi-Goutières (AGS) comprennent:

  • L'accumulation de calcium (calcification) dans le cerveau, mieux observé par scanner
  • Des modifications dans la substance blanche du cerveau et la moelle épinière, mieux observé par IRM
  • Des taux élevés de globules blancs, d'interféron-alpha et de ptérines (protéines produites par l’organisme pour combattre une infection virale) dans le liquide céphalorachidien (pouvant être testé par ponction lombaire)
  • Des lésions distinctives ressemblant à des engelures sur les mains et les pieds, généralement plus graves dans le froid

 

Génétique

Cinq gènes différents (voir tableau) ont été décrits jusqu'à présent qui, lorsque altérés par une modification génétique / mutation, peuvent causer un AGS. Pour autant que nous savons, seul un gène est impliqué par famille.

Gène - Chromosome n° - Autres noms - Pourcentage de familles avec des mutations
AGS1 - 3 - TREX1 - 35%
AGS2 - 13 - RNASEH2B - 45%
AGS3 - 11 - RNASEH2C - 15%
AGS4 - 19 - RNASEH2A - <5%
AGS5 - 20 - SAMHD1/DCIP - ~10%

Le syndrome d'Aicardi-Goutières syndrome est habituellement une maladie génétique héréditaire avec une transmission de type autosomique récessive. Cela signifie que pour un couple avec un enfant atteint, il y a un 1 risque sur 4 d'avoir un enfant malade à chaque grossesse. Trois cas ont été répertoriés avec une transmission de type «nouveau dominant». Dans ces rares cas, le risque de récidive est très faible.

 

 

Présentation clinique

D'une manière générale, il existe deux types de présentation de l'AGS. Certains bébés, en particulier ceux présentant des mutations AGS1, rencontrent des problèmes à la naissance ou peu après. Les caractéristiques comprennent des difficultés d'alimentation, des signes neurologiques anormaux, un faible taux de plaquettes (cellules sanguines impliquées dans la coagulation) et des anomalies du foie. En revanche, d'autres enfants, souvent ceux ayant des mutations AGS2, se développent normalement durant les premières semaines ou mois de leur vie. Ils font face ensuite à l'apparition soudaine d'une période d'irritabilité intense, pleurent pendant des heures, dorment mal et développent des fièvres sans infection. Pendant cette période, il ya une perte d'acquis. Après quelques mois, la maladie semble «s'arrêter». De nombreux individus avec un AGS sont encore stables en fin d'adolescence et le début de la vingtaine. Les principales caractéristiques neurologiques de l'AGS incluent des problèmes d'apprentissage, une raideur des membres avec un mauvais contrôle du tronc et de la tête, des troubles du tonus musculaire (dystonie) des membres. Bien que les problèmes neurologiques observés dans AGS sont souvent graves, un petit nombre d'enfants, généralement ceux présentant des mutations AGS2, montrent de bonnes aptitudes à la communication et d'autres fonctions neurologiques.

 

Physiopathologie

Les gènes TREX1, RNASEH2A/B/C et SAMHD1 produisent des molécules chimiques appelées nucléases qui dégradent l'ADN et l'ARN. Pendant le cycle normal de nos cellules, les nucléases nettoyent naturellement les déchets d'ADN et d'ARN produits. Une altération de ce processus peut conduire l'organisme à faire une réaction immunitaire dirigée contre son propre ADN et ARN. Une réaction immunitaire similaire est observée en réponse à l'ADN et l'ARN viral après une infection. Cela expliquerait pourquoi les caractéristiques cliniques de l'AGS et l'infection virale se ressemblent et pourquoi nous observons des taux élevés de l'interféron-alpha, un agent anti-viral, chez les enfants avec un AGS. De plus, l'interféron-alpha et la dégradation de nos propres acides nucléiques semblent également être cruciaux dans la prévention du développement d'une réponse immunitaire dirigée contre ses propres tissus lors de maladies auto-immunes comme le lupus érythémateux disséminé (SLE/lupus).

 

 

Diagnostic prénatal

La disponibilité de tests génétiques nous permettent de confirmer le diagnostic d'AGS dans la plupart des cas mais pas dans toutes les familles. C'est important à souligner compte-tenu du risque de 1 sur 4 de récidive associé. Pour certains couples,si les deux mutations peuvent être identifiées chez leur enfant, il est maintenant possible de proposer un dépistage lors d'une grossesse ultérieure ou une nouvelle technique appelée diagnostic génétique pré-implantatoire (DPI qui devient plus facilement accessible).
Traitements

Actuellement,une fois que l'enfant a subi des dommages cérébraux importants, il n'existe pas de traitement permettant de réparer ces dommages. Toutefois, si les traitements pouvaient être débutés à un stade précoce de la maladie, des thérapies pourraient s'avérer extrêmement utiles. Il pourrait s'agir de médicaments pertinents pour les autres leucodystrophies et les maladies inflammatoires, ou des composés spécifiques au processus pathologique impliqué dans l'AGS.

Pr Yanick Crow, Université de Manchester, Royaume-Uni